400,000—600,000 EUR
Lot Sold. Hammer Price with Buyer's Premium: 1,296,750 EUR
MEASUREMENTS
measurements
haut. 19,5 cm
alternate measurements
7 3/4 in
DESCRIPTION
La boîte ovoïde, formée par le réceptacle et son couvercle, est soutenue par quatre figures cariatides, alternant personnages masculins et féminins, les premiers vêtus à l'européenne d'un chapeau et d'une tunique, la taille étroite soulignée par une ceinture, les seconds d'un pagne porté sur les hanches, le buste nu. Les traits offrent les caractéristiques de l'esthétique Sapi : longs visages aux yeux exorbités, nez busqué aux ailes relevées en ancre. Très grande maîtrise de la composition, l'anneau de base relié au réceptacle par les éléments torsadés - droits ou à deux branches enroulées – fermement tenus par les mains au pouce surdimensionné ; le décor linéaire jouant sur la rigueur des lignes perlées, torsadées ou en chevron. Superbe finesse des modelés et de la gravure. Le couvercle porte les traces d'une composition sommitale, aujourd'hui disparue. Très belle patine nuancée, miel.
PROVENANCE
Jean Roudillon, Paris
Collection du Prince Sadruddin Aga Khan
Sotheby's Londres, 27 juin 1983, Prince Sadruddin Aga Khan Collection of African Art, n° 23
Collection privée, Lisbonne
LITERATURE AND REFERENCES
Reproduite dans :
Bassani, E., et Fagg, W., Africa and the Renaissance, art in Ivory, Prestel, 1988, p. 52
Bacquart, J.B., The Tribal Arts of Africa, Thames and Hudson, 1998, p. 26
Bassani, Ivoires d'Afrique dans les anciennes collections françaises, 2008 : 55, n° 46
CATALOGUE NOTE
Les premières informations relatant l'arrivée en Europe de sculptures en ivoire provenant d'Afrique remontent au début du XVIe siècle. Elles apparaissent dans les registres de la trésorerie de la 'Casa de Guiné' qui, entre 1504 et 1505, consigna les payements des taxes visant les importations de salières et de cuillers provenant d'Afrique, mais sans préciser leur origine ni indiquer s'il s'agissait d'objets en ivoire ou en autre matériau.
Durant les mêmes premières années du xvie siècle, deux chroniqueurs portugais témoignèrent de l'habileté exceptionnelle des sculpteurs de l'actuelle Sierra Leone à créer des objets raffinés en ivoire : Duarte Pacheco Pereira en 1505-1508 et Valentim Fernandes, en 1506-1510. Tandis que le premier évoquait uniquement les cuillers, le second nota qu'en dehors d'elles étaient sculptées dans ce pays, sur commande, des « saleyros, punhos pera dagas e qualquer otra sotileza » (salières, poignées de poignard et autres œuvres raffinées). Une quinzaine de cuillers et de fourchettes, trois coupes cérémonielles, deux poignées de poignard, une quarantaine d'olifants et une soixantaine de salières - dont la moitié incomplètes ou fragmentaires - sont aujourd'hui conservés, essentiellement dans des musées, mais également dans quelques collections privées occidentales.
Ces œuvres « muy marauilhosas da ver » (merveilleuses à voir) -selon l'appréciation de Valentim Fernandes - étaient destinées à enrichir les collections des seigneurs de l'époque, à l'instar de la salière créée par Benvenuto Cellini pour le roi de France, mais également celles des collectionneurs privés particulièrement sensibles à la beauté de ces objets exotiques. Le peintre Albrecht Dürer fit l'acquisition en 1521, durant son voyage aux Pays-Bas, de deux salières "de Calicut". En réalité, ce type de salière étant inconnu en Inde, elles devaient, selon toute vraisemblance, provenir d'Afrique.
D'autres objets destinés à l'exportation furent créés à la même époque dans le royaume de Benin. Elles forment, avec ceux provenant de Sierra Leone, un ensemble d'œuvres désignées sous le terme d''ivoires afro-portugais" - "sapi-portugais" lorsqu'elles proviennent de Sierra Leone et "bini (ou edo)-portugais" si sculptés dans l'ancien royaume de Benin.
Les salières « sapi-portugaises » se distinguent généralement par leur base conique lisse et décorée de personnages et d'animaux sculptés en haut-relief, ou encore par leur base cylindrique ajourée, les personnages et motifs géométriques soutenant une plateforme sur laquelle repose le réceptacle. Il existe également quelques rares autres exemplaires où la distinction est moins nette ou qui présentent des caractéristiques très individuelles.
La salière présentée ici relève du type à base ajourée, tout en offrant une caractéristique rare : les quatre figures humaines soutenant le réceptacle – deux hommes en costume européen de la renaissance, portugais ou africains habillés à l'européenne, et deux femmes aux seins nus, probablement africaines – se tiennent debout sur une fine base circulaire, tandis que la majorité des exemplaires répertoriés les figurent assises sur une base plus large. Les éléments cylindriques délicatement ouvragés en spirale - verticaux ou tressés - séparant les personnages contribuent, par leur sobriété, au sentiment d'une légèreté aérienne de la base.
Les lignes perlées - motif décoratif d'origine portugais et plus précisément 'manuelina' (du nom du roi Manuel 1er qui régna de 1495 à 1521) jouent un rôle important, dans la mesure où elles relient les personnages masculins ornant la base, au réceptacle. Le mouvement horizontal est obtenu par des éléments géométriques répétés: rangées de motifs en zigzag et à décor perlé, offrant une très belle unité à l'ensemble.
La superficie délicatement bombée du couvercle porte, au centre d'un cercle torsadé en léger relief, les traces d'un élément aujourd'hui disparu. Il s'agissait très probablement d'un personnage assis ou agenouillé devant un récipient. cf. Fagg et Bassani (1988 : 230, n° 48) et Sotheby's (Paris 3 décembre 2004, n° 125) pour une salière conservée Seattle Art Museum et un couvercle provenant de la collection Peter et Veena Schnell offrant une telle iconographie.
La forme ovale du réceptacle et la pose des personnages sont exceptionnelles. Seuls deux autres salières offrent une iconographie comparable : celle conservée au Musée des Beaux-Arts de Dijon (Bassani, 2008 : 54-55, n° 44-45) et la partie inférieure (couvercle manquant), de celle conservée au British Museum, Londres (Fagg et Bassani, 1988 : 229, n° 34).
Si elles présentent quelques différences, ces trois œuvres datent selon toute évidence de la même époque, et si elles n'ont pas été sculptées par un seul et même artiste, elles proviennent certainement d'un même atelier. Leur auteur a intentionnellement conçu une base légère et aérée pour soutenir le réceptacle de dimension proportionnellement imposante. Il en résulte, dans le cas de la salière présentée ici, une impressionnante monumentalité que la perte de la figure sur le couvercle n'a pas diminuée mais au contraire certainement rendue encore plus évidente.
Ezio Bassani, communication personnelle, février 2008
1 La 'Maison de Guiné' était une sorte de bureau des Douanes. Les documents qui datent d'avant et d'après 1504-1505 ont été perdus lors du tremblement de terre qui détruisit Lisbonne en 1755.
A magnificent and important Sapi-Portuguese ivory salt cellar, Sierra Leone, late 15th/early 16th century
The first accounts of the arrival in Europe of ivory sculptures from Africa go back to the early 16th century. They appear in the registers of the 'Casa de Guiné'[1], which recorded tax payments between 1504 and 1505 on salt cellars and spoons imported from Africa, although without indicating either their origin or whether the objects were of ivory or of other materials.
During the same period two Portuguese chroniclers described the exceptional skills of sculptors from the region of what is now Sierra Leone in carving refined objects in ivory: Duarte Pacheco Pereira in 1505-1508 and Valentim Fernandes in 1506-1510. While the former only mentioned spoons, the latter noted that 'saleyros, punhos pera dagas e qualquer otra sotilieza' (saltcellars, handles for daggers and other sophisticated objects) were also created in this region. About fifteen spoons and forks, three ceremonial bowls, two dagger handles, some forty ivory horns, and about sixty saltcellars – half of them incomplete or in a fragmentary state – are now known, mostly in museums, with some in private Western collections.
These works, which Valentim Fernandes described as 'muy marauilhosas da ver' (truly marvellous to behold), were intended to enrich the collections of the period's aristocracies, much like the saltcellar which Benvenuto Cellini created for the King of France. The painter Albrecht Dürer acquired two saltcellars 'from Calicut' during a voyage to the Netherlands in 1521. As this type of saltcellar was in fact unknown in India, it would seem probable that Dürer's examples came from Africa.
Other objects made specifically for export were produced in the Kingdom of Benin during the same period. Together with those from Sierra Leone, they form a series of works described as 'Afro-Portuguese ivories' – 'Sapi-Portuguese' for those from Sierra Leone and 'Bini (or Edo) Portuguese' if they were created in the ancient Kingdom of Benin.
The distinctive feature of 'Sapi-Portuguese' saltcellars is that they have a smooth conical base decorated with human figures and animals sculpted in high relief, or a cylindrical base with an open-work design, figures and geometric motifs supporting a platform on which the receptacle is placed. There are also a few rare examples in which the distinction is less clear or which have highly personalised characteristics.
The saltcellar presented here has an open-work base, but with one unusual feature. The four human figures supporting the receptacle – two men in European Renaissance dress, apparently Portuguese, or possibly Africans dressed as Portuguese, and two women with bare breasts, probably African – stand on a fine circular base, whereas most known examples portray them seated on a larger base. The cylindrical elements which separate the figures are delicately worked in a spiral movement – vertical or interwoven – and their sobriety contributes to the base's impression of ethereal lightness.
The beaded lines – a decorative motif of Portuguese origin, known as 'Manueline' (from King Manuel 1st, who reigned from 1495 to 1521) play an important role, linking the male figures which decorate the base with the receptacle itself. The horizontal movement is acheived by a repetition of geometric forms with rows of motifs in a zigzag pattern alongside beaded decoration, producing an attractive, overall coherence of form.
A cabled circle in very low relief on the delicately rounded surface of the cover provides a trace of a feature which has now disappeared. This was probably a figure seated or kneeling before a recipient. See Fagg and Bassani (1988: 230, no. 48) and Sotheby's (Paris, 3 December 2004, no. 125), for a saltcellar belonging to the Seattle Art Museum and a cover from the Peter and Veena Schnell collection with similar iconography.
The oval shape of the receptacle and the pose of the figures are quite exceptional. Only two other saltcellars have a comparable iconography: the one in the Museum of Fine Arts, Dijon (Bassani, 2008: 54-55, no. 44-45) and the lower part (the cover is missing) of the example in the British Museum, London (Fagg and Bassani, 1988: 229, no. 34).
Although they present a few differences, these three pieces probably date to the same period, and even lthough these pieces were not sculpted by the same artist, they undoubtedly come from the same workshop. Their author deliberately designed a light and airy base to support a receptacle of a proportionally imposing size. In the case of the saltcellar presented here, the result is an impressive monumentality which has not been undermined by the loss of the figure on the cover but, on the contrary, has made it even more evident.
Ezio Bassani, personal communication, February 2008
[1] The 'Casa de Guiné' was a kind of Customs Office. The documents dated before and after 1504-1505 were lost during the earthquake that destroyed Lisbon in 1755.
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